Transfert de terreau d’arbres à cavités abritant des indices de présence de Pique-Prune (Osmoderma eremita)

Les vieilles haies des bocages du quart nord-ouest de la France sont fréquemment citées comme des exemples de points sensibles de biodiversité à l’échelle locale. On y trouve notamment des arbres à cavités qui accueillent des communautés particulièrement diversifiées d’invertébrés saprophages, xylophages et saproxylophages. Nombre de ces espèces sont actuellement menacées d’extinction. L’espèce la plus menacée à l’heure d’aujourd’hui dans ce cortège est probablement Osmoderma eremita, dit le Pique-Prune, un coléoptère de la famille des Cetoniidae dont la larve est saproxylophage et qui est strictement inféodé au terreau des cavités d’arbres. Les populations d’O. eremita fonctionnent généralement en métapopulation ; c’est-à-dire en sous-populations isolées, chacune associée à une cavité. Ses populations sont donc inféodées à un arbre et ne le quittent que très rarement.

 

Le Pique-Prune présente une écologie et une biologie assez spécifiques. Il vit et se développe au sein d’une cavité d’arbre contenant au minimum une dizaine de litres de terreau (Ranius et al., 2005). Les espèces d’arbres colonisées, diverses, incluent des espèces des genres Salix sp., Quercus sp., Fraxinus sp., Populus sp., Tilia sp., Fagus sp., Prunus sp., Malus sp. (Ranius et al., 2005). Les larves se développent donc dans le terreau contenu dans les cavités qui leur procure un habitat régulièrement renouvelé par la chute de feuilles et de bois mort et tamponné contre les fortes variations saisonnières de température et d’humidité. Elles s’alimentent en rongeant le bois tendre du bord intérieur de la cavité. Durant la belle saison, les larves sont actives au sein de la cavité. Par contre, elles se réfugient au fond à l’approche de l’hiver (Ranius et al., 2005). Ces dernières se nymphosent alors à la fin de l’hiver ou au début du printemps. Les adultes émergent ainsi entre le mois de juin et août (Tauzin, 2005 ; Audisio et al., 2007). Les mâles ont une durée de vie qui ne dépasse pas les trois semaines tandis que les femelles peuvent vivre durant près de trois mois (Tauzin, 2005). L’activité des adultes est crépusculaire à nocturne (Ranius et al., 2005 ; Tauzin, 2005).

Ce coléoptère saproxylique est l’un des plus emblématiques de la protection de l’entomofaune en Europe. Il est protégé en France et est inscrit à l’Annexe II de la Directive Habitats Faune Flore en tant qu’espèce prioritaire d’intérêt communautaire (Beurois, 2001 ; Bensettiti, 2002 ; Juillerat & Vögeli, 2004 ; Tauzin, 2005 ; Moulin et al., 2007). La protection de cette espèce, au-delà du simple aspect patrimonial, revêt également un caractère stratégique en termes de biologie de la conservation. Les pratiques conservatoires mises en œuvre pour sa protection bénéficient automatiquement aux multiples espèces qui partagent ses habitats (Dubois, 2009 ; Jönsson et al., 2004 ; Ranius, 2002 ; Ranius et al., 2005).

Des indices de présence anciens d’O. eremita ont été décelés sur plusieurs arbres impactés par des travaux.
Afin de sauvegarder les populations de ce coléoptère et dans le cadre de contrats  entre l’entreprise CLERE (EIFFAGE) et mon entreprise Nicolas Moulin Entomologiste, le terreau contenu dans ces arbres a été transféré dans des cavités d’arbres proches.

 

Les arbres d’accueil du terreau transféré sont des arbres vivants comportant une cavité, en partie fermée ou un houppier de grande dimension avec un volume de terreau important, stade optimal, où l’on rencontre le plus souvent des indices récents de populations d’O. eremita . Ce stade d’avancement des cavités des arbres correspond au niveau 3 de l’échelle de RANIUS (Ranius et al., 2001) qui s’étend de 0 à 5.

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A la suite de ces transferts de terreau, un suivi scientifique devra être mis en place dans le cas où des larves, coques ou adultes d’Osmoderma eremita seraient mis en évidence lors des transferts de terreau. Actuellement, ce ne sont que des indices anciens qui ont été observés mais des cavités de terreau contenant des individus peuvent se dissimuler au cœur de l’arbre.

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